… Pour que le travailleur se sente bien à son travail, il faut non seulement qu’il travaille et qu’il produise, mais qu’il agisse, c’est-à-dire qu’il exprime sa liberté.
Si nous reprenons ce que dit « Hannah Arendt », Philosophe américaine d'origine allemande, le travail doit être 3 choses en même temps, sous quelque forme que ce soit :
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La peine, au sens de la dépense d’énergie (dépense physique),
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La production, au sens de la création d’objet, fussent-il immatériels,
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La liberté, l’agir ou création de sens.
Le plus complexe est sans conteste l’agir, c’est-à-dire l’expression de « ma » liberté au travail.
Or, même dans le plus répétitif (et donc aliénant) travail qui soit, il y a toujours un moyen de réinsérer de l’agir, de la liberté, du sens, par la création d’un espace-temps de discussion pour avoir un retour réflexif sur le travail dans son ensemble.
"L'identité narrative"
Par ailleurs, l’homme est une histoire, chaque homme est une « identité narrative » qui passe sa vie, son temps, à se raconter.
Il n’y a qu’à constater avec quel empressement, le soir venu, nous racontons notre journée à notre partenaire, à notre famille, à nos amis. Pour nous comprendre nous-mêmes, nous racontons ce que nous vivons. Nous apprenons à nous comprendre, à nous épeler, dans les actions que nous posons, dans les paroles que nous disons.
Lorsqu’il nous arrive un malheur, l’enjeu est pour nous d’intégrer dans notre histoire personnelle quelque chose qui nous désintègre.
Lorsque nous souffrons, le temps s’arrête, nous ne sommes plus dans la linéarité de notre histoire, mais dans un resserrement du temps sur l’instant.
Comment faire pour sortir de cette situation ?
Une solution consisterait à redonner du temps au temps – mais les entreprises n’osent pas investir de l’argent et du temps et là est le problème – pour permettre une expression de soi.
Il faut pourtant donner du temps aux salariés pour qu’ils puissent dire et comprendre ce qu’ils vivent au travail.
Il nous faudrait des décideurs courageux qui décident consciemment de prendre le temps de l’expression pour gagner en performance !
Un travail philosophique au sein même de l’entreprise ?
Le thème de la souffrance au travail fait partie intégrante du projet de Counseling Philosophie, qui se propose de mettre la philosophie au service du soin de la personne, étant entendu que le mot « soin » est pris dans son acception la plus large.
En tant que philosophes et non thérapeutes professionnels ou encore psychologues cliniciens, ils mettent en place, outre des formations, de la médiation en atelier-discussion.
L’objectif : apporter un éclairage conceptuel sur le vécu du collaborateur, avec des traces écrites qui seront pour le travailleur :
Une manière de lire sa propre parole, de pouvoir en répondre (c’est la définition de la responsabilité),
Une manière de voir sa propre parole faisant sens au milieu et avec les autres.
Ainsi, à défaut d’élargir le box (ou le lieu de travail) dans lequel le travailleur se retrouve confiné, nous pouvons encore lui donner du temps, le temps de la parole.
Synthèse issue du texte de Jean Mathy pour Counseling Philosophie