Pourquoi l’avènement du Big Data ferait-il évoluer notre compréhension du parcours professionnel et des apports en compétences d’un candidat en situation de recrutement ? En quoi sonnerait-il le glas de ce bon vieux CV sans lequel il paraît encore impossible de sélectionner puis recruter le collaborateur idoine ?
L’influence Outre-Atlantique crée semble-t-il un climat propice à ce changement de comportement et à la vague de refroidissement qui entrainerait à terme la disparition du CV.
Aux Etats-Unis la substitution du CV par le profil social semble engagée,
au point que certaines entreprises commencent à utiliser comme critère de sélection le score social. Celui-ci est calculé par des logiciels experts développés par des éditeurs comme Klout ou YouSeeMe qui mesurent l’influence des entreprises et du quidam sur les réseaux sociaux.
Cette approche, qui comporte tous les aspects d’une sélection discriminatoire, gagnerait en pertinence si la nature du comportement social et non le « volume » des informations était appréciée. Si nous pouvions avoir d’autres infos qu’une note brute évaluée sur une échelle de 0 à 100.
Dans un proche avenir les possibilités offertes par le Big Data permettront la création d’outils de requête agrégeant l’ensemble des informations sur une personne et qui auront trait à :
- sa biographie professionnelle,
- au contenu de ses projets professionnels,
- aux réseaux sur lesquels il est actif,
- à la façon dont il contribue et interagit sur ceux-ci, à ses contacts…
En conséquence, au CV classico-statique au format PDF se substituerait un profil dynamique issu des profils de réseaux sociaux professionnels comme LinkedIn, Viadeo ou Doyoubuzz.
Cette évolution est déjà engagée :
- Des cabinets de conseil en recrutement commencent à proposer aux candidats de postuler aux annonces de leur site directement via leur profil LinkedIn sans les obliger nécessairement à déposer leur CV.
- Partenaire de VIADEO, l’APEC propose de donner un accès direct au profil social du cadre et d’abonder son CV avec des informations sociales, relatives notamment à ses contacts et ses recommandations.
- Cadremploi avec son service Profil Public permet aux cadres en recherche d’emploi de créer une page Web personnalisée repérable par les moteurs de recherche à l’instar de CV Doyoubuzz.
- RegionJob pour ne pas être en reste, donne la possibilité avec Aliaz de créer une page d’accueil personnelle Web pour donner un lustre numérique à son image.
Ces nouveaux dispositifs, déployés par différents acteurs du recrutement français au cours des deux dernières années, sont la preuve que les conditions se créent pour que ces profils personnalisés et visibles sur le Web finissent de compléter les CV pour s’y substituer définitivement.
De là à imaginer recruter sans CV, il ne faut qu’un brin d’imagination et une pointe d’anticonformisme.
L’Apec a franchi le pas depuis 2010 en offrant la possibilité aux candidats de répondre à un questionnaire de mise en situation d’une trentaine de questions maximum et ce plutôt que d’envoyer un CV. Cette démarche innovante a le mérite d’ouvrir les postes proposés à une plus grande diversité de profils.
Cependant, force est de constater, qu’hormis les quelques avancées décrites précédemment, le CV reste le seul document de présentation d’une candidature sur l’intégralité des sites de recrutement. Les outils d’intermédiation professionnelle de personnes avec des entreprises sur FACEBOOK du type de Work4us ne sont pas encore les Ersatz attendus du CV et loin s’en faut.
Sans un CV, la plupart d’entre nous, experts ou béotiens du recrutement, sommes démunis pour sélectionner des candidats préalablement à un entretien d’embauche et tout autant pour mener un entretien de recrutement.
Le CV reste et demeure une béquille pour structurer sa vie et son œuvre professionnelle et servir de guide line lors des entretiens d’embauche tant pour les recruteurs que pour les candidats.
Sans devenir les contempteurs de la doxa des abolitionnistes du CV ou les chantres créationnistes du Klout, une approche qui facilite l’agrégation des données professionnelles issues des réseaux sociaux afin de mieux appréhender la diversité des compétences et des projets, les contributions, les informations relayées, est un graal (?) vers lequel le Big Data et les outils émergeants d’analyse de données devraient pouvoir nous amener.
Philippe Platel pour KACILEO